Histoire du carnaval
Limoux et son carnaval
Présenter le carnaval de Limoux, revient à se plonger dans les entrailles historiques et culturelles du folklore local.
Que n’a-t-on écrit sur ses origines, ou encore sur les « us et coutumes » qui régissent le carnaval de Limoux, carnaval le plus long du monde. Au cours du siècle écoulé, nombre d’historiens et d’écrivains se sont penchés non sans une certaine verve sur ce qu’il est convenu d’appeler un véritable phénomène limouxin.
Une histoire en question
Atypique et emblématique à la fois, le carnaval de Limoux possède des origines qui se perdent dans la nuit des temps. Si le masque existe depuis l’antiquité, dans la cité blanquetière, on retrouve traces de fêtes et de célébrations festives dès le moyen-âge. Quelques peintures et tableaux évoquent en effet, des moments de liesse populaire où le travestissement était prétexte à l’abolition temporaire de codes sociétaux. En ces temps là, on se retrouvait autour d’un feu, dans des danses et rondes enthousiastes nourries d’allégories souvent nocturnes.
À proprement parler, les premiers écrits du carnaval remonteraient au début du XVI° siècle. Émanation de la fête du Vin et de la Saint-Martin ou fêtes des Meuniers, les avis divergent. La période carnavalesque demeure cependant la pérennisation d’une tradition qui se s’est jamais délitée dans le temps.
Le carnaval de l'ère moderne
À l’instar des jeux olympiques et de leur origine antique, l’émergence du carnaval dit de l’ère moderne se situe juste après la fin de la deuxième guerre mondiale. Dans un pays qui se reconstruit et qui, après bien des moments de souffrances et de privations appelle à une renaissance festive, le carnaval limouxin se fédère de fait, en un comité. Dès lors, il précise les modalités de ses dogmes et règles. Au demeurant, il s’agit ici d’un incontournable paradoxe dans un univers où la liberté et l’extravagance priment.
Les acteurs de la fête
Non, le carnaval de Limoux se défend d’être un spectacle, car il existe une véritable symbiose entre les gens masqués ou travestis et ceux que l’on nomme affectueusement les badauds. Chacun ici a son rôle à jouer.
Le contexte et le cadre du carnaval
Fête résolument païenne, le carnaval de Limoux doit impérativement se terminer avant la fête religieuse de Pâques. Composé de prime abord par 10 bandes, parties intégrantes du comité, celles-ci effectuant leurs sorties exclusivement le dimanche (excepté la bande des Anciens qui sort traditionnellement le mardi-gras). Il convient de rajouter la bande des Meuniers qui est formée par des éléments de chaque bande et qui a pour fonction d’inaugurer la nouvelle édition du folklore limouxin. En conséquence le carnaval qualifié de plus long du monde se poursuit durant plus deux mois et demi.
Aujourd’hui le carnaval « le plus du monde » se compose dans sa globalité de 32 bandes répertoriées.
Si ce recensement a connu depuis une trentaine d’années une progression exponentielle, le lieu et le déroulement restent immuables. La place de la République de Limoux et ses ancestrales arcades représentent la scène où les Fécos vont ainsi se produire.
Vous souhaitez en connaitre plus sur le carnaval de Limoux ?
La charte du carnavalier , vous connaissez :
Bien qu’il n’existe aucun règlement établi, la tradition et le bouche à oreille fixent les codes du bon carnavalier.
Des entités emblématiques comme Les Anciens, Le Pont Vieux, les Arcadiens, le Paradou et bien d’autres crées il y a déjà des décennies, constituent grâce à leurs savoirs faire une véritable épine dorsale du folklore limouxin.
Durant le week-end, les sorties se déroulent en trois périodes :
- Le thème du matin
- La sortie de l’après-midi
- La soirée aux entorches
En effet lors de la sortie de 11h, chaque bande présente aux badauds, la mise en scène d’une thématique humoristique et souvent irrévérencieuse. Forçant volontairement le trait, les sujets évoqués caricaturent exagérément des faits d’actualités majoritairement propres à la vie de la commune et aux personnages emblématiques qui la composent.
L’après-midi, les membres de la bande revêtent leur costume propre, un pierrot décliné dans diverses couleurs et diverses formes. En outre, cette tunique se compose d’un masque, d’un ensemble pantalon et veste aux formes amples, d’une collerette, accompagnés de gants, cagoule et mocassins sombres complètent la tenue. Ainsi, Le carnavalier ne doit laisser paraître aucune partie du corps.
Le point de départ, est généralement, l’un des estaminets de la place de la République, les carnavaliers prennent place dès lors devant les musiciens. Dans un inflexible rituel, deux ou trois meneurs se placent juste devant les musiciens, ils officient tel des chefs d’orchestre. Ce sont eux qui stigmatisent l’ensemble des regards et particulièrement celui des connaisseurs qui observent cette sorte de chorégraphie propre au carnaval limouxin. De leurs carabènes, les carnavaliers battent la mesure, l’ensemble est majestueux, les gestes sont amples et les pas semblent fouler les raisins dans les pressoirs. En musique, alors qu’ils se dirigent lentement mais inexorablement vers une seconde halte dégustative, les autres fécos jettent sans vergogne de grandes poignées de confettis. Signe d’offrande ou de reconnaissance, les badauds maculés de ces petits bouts de papiers apprécient ses artifices et en redemandent parfois.
Le dernier acte de cette représentation folklorique se déroulera à la lumière des entorches en début de soirée. Des entorches qui ont été préalablement confectionnées avant le début du carnaval selon des recettes transmisses de bouche à oreilles.
Ces entorches confèrent encore une atmosphère particulière faite de volute à l’odeur de résine de pin.
Qui sont les goudils?
Si les bandes possèdent leur entité et leur histoire propre, le goudils fait souvent figure d’électron libre à l’intérieur du folklore limouxin. Personne ne sait pas qui il est. Il se travestit indifféremment, un vieux fichu trouvé dans un grenier et muni d’un poireau qu’il agite sous le nez des badauds. Les thèmes individuels sont ici librement choisis. Le goudils se tient généralement derrière les musiciens, modifiant voix et intonation, il possède un dialogue ironique pour pratiquer ce qu’il est convenu d’appeler « la chine ». Encore un mot bien spécifique au carnaval blanquetier. En effet, le goudils caché derrière son masque instaure un dialogue avec un badaud. Ensuite il énonce dans la pluspart du temps, des vérités sur son interlocuteur, provoquant chez celui-ci une grande interrogation. La résolution de cette petite énigme a pour cadre le bar d’un café de la place où devant une coupe de blanquette, la conversation se poursuit.
Si le goudil a droit de cité sous les arcades lors de chaque sortie, le Mardi Gras concentre toutefois le plus grand nombre.
L'incinération de sa majesté carnaval
À tour de rôle, chaque bande apporte sa touche finale à chaque édition lors de la nuit de la Blanquette. Sa Majesté carnaval doit tristement finir en cendre. De façon inexorable, le point final est ainsi apporté à la conclusion de chaque édition. Jugé par un tribunal (en langue occitane), le carnaval, fête païenne par excellence doit trouver sa triste fin au milieu d’un bûché. Et c’est ainsi qu’il faut mettre un terme à ces agissements. L’inexorable sentence prononcée, le bourreau effectue sa besogne, il allume au centre de la place de la République, un gigantesque feu et y jette sans ménagement l’emblème folklorique de l’année.
L’heure est grave et presque solennelle pour des carnavaliers qui tour à tour pleurent à la fin du carnaval mais rient au carnaval à venir. En terre limouxine, le carnaval renaît de ses cendres toujours neuf mois après.
(Rédaction Claude Delbourg)